Pratiquant la marche au long court, d’abord au travers de ses lectures, de Sylvain Tesson à François Rufin, Marc Muret avait déjà un univers de voyage et de grands espaces avant de ressentir le déclic pour Santiago.
Sur la base de quelques récits, de témoignages, l’envie de partir sur le chemin, comme un parcours initiatique autant qu’un micro exil.
Rescapé du chemin de Saint-Jacques, Marc Muret va plus loin avec une nouvelle création en perspective.
Marc Muret : « Santiago » est son nouveau concept.
« Une idée qui me trotte dans la tête depuis 6 ans, depuis que j’ai entrepris en 2016 mon Camino, le Chemin vers Santiago de Compostelle. »
Pour l’auteur, «il est sûr que celles et ceux qui ont eu la chance de l’emprunter s’en trouvent tous bouleversés, transformés, remis en question, alors moi aussi ».
Beaucoup de lieux communs ont été écrits pour le chemin, comme celui-ci « On y cherche une part de soi même qu’on trouve où qu’on retrouve ». Mais ce n’est pas sur cet angle introspectif que Marc Muret a construit son écriture.
Marc Muret : « Chacun lit et interprète son Camino à sa façon.
Pour moi, la dimension la plus pénétrante, la plus stimulante est avant tout la profondeur historique du sentier. » C’est donc sur une lecture historiographique mêlant les traces, l’histoire, la géographie et la topographie du chemin que Marc Muret a choisi de travailler.
« Chaque pas, chaque direction sont sous-tendues de siècles et de siècles d’histoire. La grande comme l’ordinaire, celle de pèlerins anonymes, humbles qui y ont posé leurs traces. L’idée principale et de remettre de la visibilité et de la lisibilité historique au chemin ». Pour Marc Muret, «il n’y a pas que les pierres qui jalonnent le Camino, il y a bien plus que cela ».
C’est cette dimension du Camino qui traverse, qui transcende les époques et qui survit aux hommes qui est mise en avant. « Le Camino survit aux hommes et c’est pourtant eux qui le font vivre » rajoute t’il.
Le Camino ce sont des paysages, tous les jours différentes ambiances. Parfois du vide, de l’immensité, parfois du tumulte et de la grégarité.
Autant que ses pèlerins, le Camino est parsemé de lieux et de marqueurs insolites. De l’art, de l’incongru, du bizarre, du traditionnel, on trouve de tout sur les bords du chemin.
« Le marcheur a le temps de penser, il a aussi le temps d’observer » et cette observation est forcément riche sur bien des plans.
Sur un plan sociologique, le pèlerin se mêle et se relationne sur un mode solidaire et égalitaire avec des personnes d’une très grande diversité. On découvre, on échange avec des gens de toutes conditions, venus du monde entier. « Il y a peu de lieux et de moments dans le monde où l’on peut côtoyer en si peu de temps autant de nationalité et autant de différences » déclare l’auteur.
Sur un plan naturel, le chemin a de quoi régaler les marcheurs des plus écolos. Marc Muret s’est lui-même prêté à son échelle à un inventaire biologique, en tentant de dénombrer les espèces croisées en chemin : « en arpentant des reliefs, des climats et des environnements particulièrement variés, le Camino traverse souvent des Zones naturelles particulièrement riches »
Espèces avicoles endémiques, insectes communs ou grands mammifères, il n’est pas rare de croiser au détour d’un sentier, d’une forêt ou d’une colline, un chevreuil, un sanglier, un Potok ou une belette. « On pourrait présenter le Camino comme une autoroute à pèlerins, et c’est en partie le cas à certain moment de l’année, mais le chemin serpente souvent loin des zones habitées au cœur de la nature souveraine et ce n’est pas tous les jours que cela nous arrive. »
Mais c’est bien le plan historique et mémoriel que Marc Muret entend mettre en avant. Les templiers, les omeyades, les rois d’Aragon, les castillans, le chemin est encore le produit de tout le métissages historiques de l’Espagne au travers des siècles. Ce n’est pas tant la chrétienté qui a façonné le chemin que la grande histoire.
C’est une lecture des soubresauts historiques que n’ont pas la plupart des pèlerins venus de très loin. « J’ai voulu remettre en lumière le chemin à travers les âges remettre la quatrième dimension sur le tracé » .
Le Camino n’est pas complètement une route des châteaux et ce n’est pas qu’une route des églises. C’est avant tout une route, avec un tracé, des chaussées, des ponts, des trottoirs.
Mais l’itinéraire est t’il encore véritablement le même qu’au travers des siècles passés ?
Mar Muret : « La question mérite d’être posée » répond l’auteur.
« Depuis 1500 ans, bien évidement le paysage a été transformé par l’homme. Les routes, les autoroutes, les ouvrages d’arts, les entrées de villes contraignent voir compromettent le passage des piétons et donc des pèlerins. Alors, c’est évident, le tracé originel (qu’est ce qu’un tracé originel.) Enfin le tracé historique a été modifié et l’est encore à la marge.
Souvent les adaptations de quelques kilomètres ont pour but de faciliter la marche des pèlerins, leur éviter un obstacle ou le plus souvent les soulager d’une marche le long d’une circulation automobile dense.
De mon expérience et de mon évaluation, je dirais qu’environ 50% de l’itinéraire actuel respecte le chemin d’origine. Les modifications sont forcément limitées, d’abord à l’obligation impérieuse de relier les villages étapes, ensuite à l’impossibilité de rallonger inutilement l’itinéraire.
Le Camino de Saint Jacques de Compostelle reste une expérience humaine, Marc Muret entend en faire une expérience historique.